Droit à l’image en street photography : ce qui est légal (ou non) en France en 2025

Droit à l'image en street photography - exemple de photo illégale - Couple de dos s'embrassant devant la Pyramide du Musée du Louvre à Paris

Photographier dans la rue, entre passion et précaution

Depuis mes débuts dans la street photography, j’ai toujours ressenti ce frisson unique : celui de capturer l’instant, le vrai, sans artifice. Une lumière passagère, un geste suspendu, une scène banale mais profondément humaine. C’est ce qui me passionne. Mais très vite, une question s’est imposée à moi : « Ai-je le droit de photographier cette personne ? De publier cette image ? »

La street photography est une pratique aussi libre qu’encadrée. Elle flirte sans cesse avec les notions de vie privée, d’espace public, de création artistique… et de légalité. C’est ce flou que j’ai voulu éclaircir dans cet article. En tant que photographe de terrain, je vais te partager ici un guide clair, pratique et humain sur le droit à l’image en France en 2025, pour t’aider à photographier dans le respect, la créativité et la loi… Alors, comment fonctionne le droit à l’image en street photography ?

1. Le droit à l’image en France : que dit la loi en 2025 ?

Commençons par une vérité : il n’existe pas de loi unique et explicite sur le droit à l’image en France. En réalité, ce droit repose sur trois piliers juridiques et de nombreuses jurisprudences :

1.1. L’article 9 du Code civil

« Chacun a droit au respect de sa vie privée. »

Cette phrase très courte est pourtant à l’origine de la majorité des décisions juridiques sur le droit à l’image. Elle implique que toute personne, même dans un lieu public, a le droit de s’opposer à l’usage de son image si elle estime que cela porte atteinte à sa vie privée.

1.2. La Convention européenne des droits de l’homme (article 8)

Ce texte protège également la vie privée des individus, y compris contre des utilisations abusives de leur image. Il renforce l’idée qu’une personne a le droit de contrôler sa représentation publique, quel que soit le contexte.

1.3. Le Code pénal (en cas de photo prise dans un lieu privé sans consentement)

Photographier une personne à son insu dans un lieu privé (appartement, jardin, chambre d’hôtel…) est puni par la loi (article 226-1 et suivants). C’est une atteinte grave à l’intimité de la vie privée.

Ce qu’il faut absolument retirer, c’est que tu as totalement le droit de prendre une personne en photo dans la rue, même sans son consentement. Ce qui peut éventuellement poser problème et être illégal sera le fait de diffuser cette photo.

2. Droit à l’image vs droit d’auteur : le vrai débat

Ce qu’il faut bien comprendre, c’est que le droit à l’image entre souvent en conflit avec un autre droit : le droit d’auteur du photographe. En tant qu’auteur, tu as le droit de créer et de diffuser une œuvre artistique, même si elle représente une personne identifiable. Mais ce droit n’est pas absolu.

En cas de plainte, ce sera le juge qui tranchera, au cas par cas, en évaluant la portée artistique, informative ou commerciale de la photo, ainsi que le préjudice éventuel causé à la personne photographiée.

En clair :

  • Si ta photo est prise dans un contexte artistique, informatif ou historique → ton droit d’auteur peut primer.
  • Si la personne est clairement identifiable, exposée négativement, ou utilisée à des fins commerciales → son droit à l’image peut l’emporter.

2.1. Consentement au droit à l’image : écrit, oral ou implicite ?

Si tu souhaites photographier une scène dans la rue avec une personne identifiable, tu dois lui demander son consentement. En droit, le consentement écrit est toujours préférable. Cependant, un consentement oral ou implicite peut suffire selon les cas (par exemple, lors d’un shooting organisé ou en présence du photographe clairement visible). Un simple “oui” oral peut parfois suffire, mais en cas de litige, seul le formulaire signé peut faire la preuve.

Mais en cas de litige de droit à l’image en street photography, c’est à toi de prouver le consentement.

 2.2. Exceptions : quand le consentement n’est pas obligatoire

Certaines exceptions vous permettent de diffuser une photo sans autorisation :

  • Actualité / information légitime (manifestations, événements publics)
  • Personnages publics dans l’exercice de leurs fonctions (hommes politiques, célébrités…)
  • Foule dans un lieu public, si aucun individu n’est isolé ou mis en valeur

Ces exceptions sont strictes : il faut que la personne ne soit ni isolée, ni reconnaissable, ni placée dans une situation attentatoire à sa dignité.

3. Comment photographier dans la rue légalement ? (Guide pratique 2025)

La photographie de rue est un art de l’observation, de l’émotion, du moment. Tu veux photographier dans la rue en toute sérénité ? Voici quelques bonnes pratiques pour concilier création et respect du droit à l’image en street photography.

Un équilibre à trouver : pas de paranoïa, mais de la conscience

La street photography n’est pas illégale en soi. Ce qui peut poser problème, c’est la diffusion et l’usage de la photo, notamment si la personne est isolée, reconnaissable, et non consentante. Il ne s’agit pas de s’auto-censurer, mais de savoir ce qu’on fait, pourquoi on le fait, et comment on le partage.

Lorsque je photographie dans la rue, je m’efforce d’être discret, respectueux et conscient. Mon choix est souvent de jouer sur l’anonymat plutôt que de le briser. Cela me permet de capturer l’essence de la rue sans exposer qui que ce soit.

Mes conseils concrets pour respecter le droit à l’image en street photographie :

  1. Privilégie les scènes d’ensemble : une foule, une silhouette de dos, une scène floue ou prise à grande distance : plus les visages sont flous ou méconnaissables, moins il y a de risques juridiques.
  2. Demande l’autorisation, quand c’est possible : un échange de regard, un sourire, un simple hochement de tête peuvent suffire à créer un consentement tacite, surtout si tu partages l’image ensuite avec bienveillance.
  3. Ne publie pas sans réfléchir : même si tu as pris une photo dans un lieu public, publier une image sur ton site, Instagram ou dans un livre est une “exploitation”. Demande-toi « La personne est-elle reconnaissable ? Est-elle dans une situation embarrassante ? L’image pourrait-elle lui nuire ? »
  4. Sois transparent sur ton intention artistique : si tu présentes ton travail comme un projet documentaire ou artistique, et que tu expliques ta démarche, le regard change. Cela peut aussi t’aider à défendre ton droit d’auteur en cas de litige.
  5. Propose un droit de retrait : tu peux afficher sur ton site une mention simple : « Si vous apparaissez sur une photo et souhaitez qu’elle soit retirée, contactez-moi. » C’est une bonne manière de montrer ta bonne foi et d’éviter les tensions.

4. Deux cas concrets pour comprendre le droit à l’image en street photography

4.1. Photo illégale : portrait net d’un passant isolé

Attention, cette photo est uniquement utilisée à titre d’exemple. Il s’agit d’une photo libre de droit provenant de la librairie d’image Pexels. Il s’agit donc d’une photo totalement légale, mais qui est parfaite pour illustrer les propors.

Droit à l'image en street photography - exemple de photo illégale - homme déjeunant en terrasse d'une boulangerie

Pourquoi cette photo pourrait ne pas être légale ?

Cette photo montre un homme parfaitement reconnaissable, seul dans le cadre, qui aurais-pu être prise sans son consentement et qui pourrait être utilisée pour une campagne marketing.

4.2. Photo légale (mon propre travail)

Cette photo a été prise depuis le belvédère du parc de Belleville à Paris. On y aperçoit un couple, flou, sombre, capturé de loin. La scène est paisible, la lumière douce, la Tour Eiffel veille en arrière-plan.

Droit à l'image en street photography - exemple de photo illégale - Couple flou devant la Tour Eiffel au coucher du soleil depuis le Belvédère de Belleville à Paris

Pourquoi cette photo respecte le droit à l’image ?

  • Les individus sont flous et peu identifiables
  • Il n’y a aucune intention de les mettre en défaut ou de nuire
  • L’image est présentée dans un contexte artistique et contemplatif

C’est un exemple typique de street photography responsable, qui respecte la légalité tout en restant expressive et personnelle.

5. Ce que tu risques si tu ne respectes pas le droit à l’image

5.1. Sanctions civiles

Si tu publies la photo d’une personne reconnaissable sans son accord, elle peut te poursuivre au civil pour :

  • Atteinte à la vie privée
  • Demande de suppression de l’image
  • Dommages et intérêts

Les indemnités peuvent atteindre plusieurs milliers d’euros.

5.2. Sanctions pénales (plus rares)

Dans certains cas graves (ex. : diffusion nuisible, diffamation, harcèlement), tu risques aussi une plainte pénale.

5.3. Cas célèbre

Le photographe Robert Doisneau a été attaqué par des personnes affirmant être les sujets de la célèbre photo Le Baiser de l’Hôtel de Ville. En réalité, il s’agissait d’un couple de comédiens… engagés avec autorisation. L’affaire a été classée, mais rappelle combien la perception du droit à l’image peut évoluer.

Droit à l'image en Street Photography : Le Baiser de l'Hôtel de Ville - Robert Doisneau

Le Baiser de l’Hôtel de Ville – Robert Doisneau

6. Mon approche personnelle : respect et authenticité

En tant qu’auteur-photographe, je revendique une approche humaniste et discrète. Je ne photographie jamais pour choquer ou provoquer. Mon objectif n’est pas de voler des instants, mais de témoigner de la beauté discrète du quotidien, sans jamais porter atteinte à ceux qui le peuplent.

La photo du couple au parc de Belleville en est un exemple. Plutôt que de focaliser sur les visages, j’ai choisi une composition jouant sur le contre-jour, la silhouette, la lumière naturelle, et une forme de douce abstraction. Cette démarche vise à inspirer sans exposer, à émouvoir sans déranger, et à valoriser la ville comme un décor vivant, où l’humain est toujours traité avec pudeur et respect.

Mon travail est avant tout documentaire et poétique. Même dans les rues, je cherche la beauté de l’instant, l’émotion dans l’ombre, la lumière sur l’ordinaire. Je veille toujours à respecter l’intimité de ceux que je croise. Et je pense qu’un de mes traits de caractères ressort énormément dans mes photos : ma timidité. Cela est aussi un atout pour mes photographies de rue car naturellement, je vais chercher à trouver un angle me permettant d’avoir des silhouettes qui apporteront de la vie à ma composition, tout en restant toujours floues ou de dos, afin de ne pas porter atteinte au droit à l’image de la personne photographiée.

Street photography et droit à l’image, une alliance possible

La photographie de rue en 2025 n’est pas condamnée à l’illégalité. La street photography est un art passionnant, mais exigeant. Elle te pousse à être vif, curieux, et respectueux. Il ne s’agit pas d’avoir peur de photographier, mais de le faire avec éthique, conscience et transparence.

Le respect du droit à l’image en street photography ne bride pas la créativité. Il l’oriente vers des compositions plus subtiles, plus poétiques, plus responsables. En respectant ces quelques principes simples, tu pourras continuer à pratiquer ta passion tout en protégeant ton droit d’auteur… et celui des autres.

Si tu veux découvrir d’autres clichés urbains capturés dans cet esprit, je t’invite à visiter ma galerie dédiée à la photographie de rue pour découvrir mon travail plus en profondeur

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